proposée par Pascal 

Alors que les tours Pernon accueillaient leurs premiers aristocrates, le petit garnement d’une dizaine de bougies que j’étais survivait chez ses vieux encastrés dans un immeuble canut de la rue de Nuits.

Ces anciennes bâtisses avaient quelques particularités extravagantes :
– Des hauteurs de plafond flirtant avec les sommets : plus de 4 mètres ! Autant dire qu’au 3ème étage, on se croyait déjà au 5ème dans un gratte-ciel dernier cri !
– Pour atteindre notre appartement nous devions nous coltiner des escaliers en pierres alambiqués, conçus par le diabolique Escher* lui-même, glissants à souhait et bosselés par le temps qui en avait manifestement après nos fesses !
– Pas de spa privé dans notre appartement de location, oh non ! Juste une petite pièce biscornue sous les toits avec un évier et un bac en guise de jacuzzi.
– Et les toilettes ? Laissez-moi rire ! Pour accomplir l’exploit, il fallait sortir sur le palier, grimper trois ou quatre marches olympiques, et affronter l’antre des horreurs, une minuscule pièce glaciale abritant le trône des temps anciens..

Un de mes camarades de classe, lui, vivait dans l’une de ces extravagantes tours Pernon, une tour symbole de la modernité aux yeux d’un petit garnement canut. Quel privilège ! Il avait droit à l’ascenseur magique, et je soupçonne qu’il a fait des allers-retours en boucle rien que pour le plaisir de défier la gravité ! Et pour couronner le tout, le nirvana du confort : une salle de bain décadente où l’on pouvait se prélasser comme un roi et une pièce dédiée aux urgences naturelles, un véritable salon V.I.P pour soulager ses besoins !

Ah, comme quoi, la vie est pleine de surprises et de contrastes ! Alors, je l’avoue, j’ai ressenti une légère pointe de jalousie envers ce chanceux camarade, mais bon, être le roi des escaliers glissants et des salles de bains sommaires, c’est une aventure en soi ! On peut dire qu’on était de vrais casse-cou, à l’ancienne !


Relativité : lithographie de l’artiste néerlandais Maurits Cornelis Escher