proposée par André
Nous étions le 31 Janvier 1956, j’avais 11 ans. Mon père, roulant SNCF aux horaires très irréguliers, rentrait, il était environ 21 heures et il nous dit : « Eh bien, les gones, ça pince ce soir ! ». Effectivement, le lendemain, il a fallu se rendre à l’évidence. Nous n’avions jamais enduré une telle température. Sur la devanture de notre marchande de bonbons, la mère Gay, il y avait un grand thermomètre à alcool. Nous étions tous devant. Verdict : moins 27° ! Notre école était chauffée (chauffage central) mais le concierge, Mr Bouvier, avait un sacré boulot pour alimenter la chaudière à charbon. Les élèves du Collège Neyret (dans des préfabriqués au Clos Jouve) n’avaient pas classe. L’encre gelait dans les stylos.
Des colonnes de glace ornaient toutes les rues. Les éviers, condamnés, tous les tuyaux avaient éclaté. On ne pouvait plus ouvrir les fenêtres. Les vitres étaient décorées de fleurs de glace. Ma mère nous mettait des briques chaudes dans nos lits. Le temps d’aller à l’école, avec nos culottes courtes, nos genoux étaient violacés. Et cela a duré un mois (tout le mois de février). Heureusement : quel régal, pour les glissades !
On a peine à imaginer, maintenant, comment nous avons vécu pendant cette période. Et pourtant…
La vague de froid fait la Une des journaux…

Les bateaux prisonniers de glaces sur la Saône / Photo d’archives Le Progrès
HIVER 1956 : Quel choc thermique ! – 21° C à Lyon
A Lyon, la Saône est devenue solide, au point de se laisser apprivoiser par des patineurs.
Le Rhône charrie des glaçons et les fontaines deviennent sculptures de glace. Le vent est glacial avec des pointes jusqu’à 140 km/h. La nuit du 1er au 2 février est terrible, c’est le point de départ d’un hiver givré : l’exceptionnel va devenir norme imposée jusqu’au 29 février.
J’allais à l’école St Augustin rue Grataloup, j’habitais impasse Dubois. J’emmenais mon petit frère Jean-Pierre avec moi. Pour ne pas avoir froid, notre mère remplissait l’intérieur de notre canadienne de papier journal ! Le matin elle allumait le gaz de la cuisinière et on s’habillait devant, debout sur une chaise, pour avoir un peu de chaleur… Nos plafonds faisaient 4m 50 de haut ! De bons souvenirs quand même.
Je confirme, les plafonds étaient très hauts, dans un rouleau de tapisserie on ne faisait que 2 lés ! on avait fait des rajoutures derrière de cosy… quant aux WC qui étaient gelés en 56, ils ont réussi à faire un ascenseur à la place, pas très large certes, mais les étages de canuts ça fatigue…
J’avais 13 ans aussi, mon père qui était charcutier chez Roux-Soignat boulevard de la Croix-Rousse, était obligé de mettre la viande dans les frigos pour pouvoir la couper. Avec mon copain Michel nous étions descendus au parc de la Tête d’Or faire des glissades sur le lac qui était gelé ; une barrière en bois séparait une partie sécurisée pour ceux qui avaient des patins ; nous, nous empruntions des chaises en fer pour glisser. Les WC sur le palier étaient gelés, et nous étions obligés de descendre au rez-de-chaussée avec un seau d’eau chaude ! Avec le temps ça reste un bon souvenir.
J’avais 13 ans et j’en ai un souvenir encore très présent, les températures de ces derniers jours sont très clémentes en comparaison.
Les profs de sport dans mon lycée continuaient quand même à nous prévoir matchs et déplacements à travers Lyon… là le souvenir est très cuisant (sans jeu de mots).
Réponse d’un copain :
« J’avais 9 ans et le lait gelait dans la berthe, le temps de revenir de la crèmerie ».
Souvenir d’une copine:
« oui oui, je me souviens. J’avais 8 ans. Mon père, maçon, était arrêté pour intempéries. Il m’amenait le matin à l’école car il avait des sabots qui tenaient bien. Puis l’école a fermé : plus de charbon ; les charbonniers ne livraient plus, ni le laitier ni le crémier…
Quel hiver !
Et que de beaux dessins sur les vitres ! »
Heureusement, nous avions des pèlerines. Ma mère les « taillait » dans les anciennes capotes SNCF de mon père…
Un énorme bloc de glace en équilibre sur une enseigne de boutique rue du Mail est tombé sur le trottoir juste devant moi ! j’avais 5 ans, on revenait de l’école Cdt Arnaud, ma mère en a frissonné longtemps…
Je suis né en février 1956 et ma Maman ma raconté qu’à la maternité de l’hôpital de la Cx-Rousse ils regroupaient les nouveaux nés par 3 ou 4 dans les couveuses pour nous tenir au chaud.
Elle m’a raconté également que son propriétaire avait coupé l’eau dans son immeuble car il avait peur que la colonne d’eau éclate et il fallait aller chercher de l’eau à la « pompe » au coin de la rue qui fonctionnait miraculeusement quelques heures par jour. Les gouttières ainsi que les colonnes des WC communs à tout l’étage et situés dehors sur la galerie étaient gelés et il fallait vider les »seaux » dans les bouches d’égout dans la rue.